Un peu d’histoire : quelques aléas, mais un développement continu
Dire que le « Bistrot du théâtre » est étroitement lié à l’histoire de Jouy-le-Moutier est un euphémisme, tant les témoignages abondent en ce sens !
Au XVIIIe siècle, l’endroit abrite un atelier de tonnellerie, aux mains des Millet, puis des Masle, qui y ont aussi ouvert une petite épicerie.
Louis Marin Masle, devenu propriétaire, fait construire une première salle de danse et ajoute à son activité d’épicier celle de marchand de vin. Son fils, puis surtout son petit-fils, développent l’affaire. La tonnellerie est abandonnée, l’épicerie et le négoce des vins sont devenus les piliers de l’activité.
En 1900, les lieux passent aux mains des Monteil, puis de leur fille Léa, qui épouse le Jocassien Maxime Cartry et acquiert en 1923 le « commerce d’épicerie, vins, restaurant ». C’est le début d’une grande aventure familiale. Un âge d’or jusqu’à la guerre, marquée par un ralentissement. Par la suite, les gérants se succèdent, en particulier les Augeron qui donnent au restaurant un renom et une nouvelle envergure.
A leur suite, jusqu’en 1996, les gérants se succèdent avec plus ou moins de bonheur, le théâtre périclite, l’épicerie a fermé.
Mais Laurence Cartry, la petite-fille de Léa Cartry, aidée de sa famille, décide de faire revivre les lieux, qui reprennent peu à peu vie.
2007 marque un nouveau tournant, lorsque Christophe Bayle s’installe aux fourneaux, pendant que Laurence gère la partie théâtre. Le succès ne se dément plus !
Au centre du village : une épicerie, un café, un restaurant, une salle de spectacles
La petite épicerie de village fournissait aux habitants tout ce dont ils pouvaient avoir besoin au quotidien pour manger, boire, laver, se vêtir, s’éclairer, s’amuser, fumer, bricoler. Les bocaux de verre offraient au regard leurs friandises colorées, les tiroirs des deux comptoirs et les vitrines regorgeaient de marchandises que l’on pesait avec des poids de cuivre et que l’on vendait dans des cornets en papier. L’odeur du café torréfié embaumait la boutique, où Léa trônaient avec sa mère, puis avec ses filles.
A la cave, fûts et bouteilles renfermaient tout ce qui pouvait se boire en vins alcools et sirops. Maxime y veillait, mais assurait aussi la gestion du café-tabac-billard- téléphone- pompe à essence. C’était le royaume des hommes.
On venait « chez Maxime », ou « Chez Cartry », jours ouvrés, dimanches et fêtes. Au temps des Augeron, les équipes de tournage de « La vie de famille » ou de « La septième compagnie au clair de lune » s’y restauraient, ainsi qu’en témoigne le livre d’or. En temps ordinaire, les habitués venaient boire un café ou un apéritif, acheter le journal. Le docteur passait pour savoir qui il devait visiter !
Une salle exceptionnelle
A l’étage, la salle que l’on peut encore voir aujourd’hui est exceptionnelle à bien des égards.
Un cartouche, sur le balcon, indique qu’elle a été construite en 1866 par Louis Marin Masle, peut-être suite à l’incendie de la salle précédente.
On y accède par un escalier décoré au pied duquel les mariés posaient inévitablement.
La salle possède encore son décor peint, d’origine, en partie restauré, unique en Ile-de-France. Le balcon abritait des bancs de bois, les énormes lustres, dotés de mécanismes qui permettaient de les actionner, éclairaient les lieux, un piano mécanique assurait l’ambiance.
Tout était en place pour les festivités qui ne cessaient de s’y dérouler : réunions diverses, mais surtout mariages, communions, banquets et bals de pompiers, de conscrits, de jeunes ou d’anciens, repas de la Saint-Vincent ou de prisonniers, réveillons, tandis que la scène de théâtre, toujours dotée de son superbe rideau, servait d’écrin aux distributions des prix, aux spectacles d’enfants, aux acteurs, aux chanteurs, en particulier Fred Gouin, voire aux prestidigitateurs, enfin au cinéma.
Il s’agit donc d’un véritable lieu de mémoire, inscrit dans le passé, mais aussi ouvert sur l’avenir !
Pour en savoir plus
« Lieux de vie, lieux de mémoire. Le théâtre et le bistrot Saint-Vincent, à Jouy-le-Moutier ». Publication de l’Association du village, 2010. En vente au Bistrot.
Textes de Françoise Waro